Ton corps souffre, écoute le

Ton corps souffre, écoute le

Tendinite : c’est l’inflammation du tendon. Le tendon est lui-même la partie finale et renforcée d’un muscle, son extrêmité, l’endroit où le muscle s’attache à l’os, son point d’ancrage, qui permet la traction sur la structure osseuse, permettant ainsi le mouvement. L’inflammation signe le feu, l’émotion rentrée, la colère. Cette présence émotionnelle forte rend l’action et le mouvement d’une partie de notre corps difficiles et douloureux. Est-ce que je peine à avancer, dois-je lâcher, ne plus serrer ou tenir, ne plus forcer ? En tous cas il est clair que le mouvement me fait mal. Sans doute dois-je faire une pause ou bien agir ou me comporter avec plus de douceur, en étant plus à l’écoute —- « Dis moi où tu as mal » de Michel Odoul

 

 

Au bout de 13 ans de pratique sans une seule blessure, je me suis retrouvée avec une tendinite à l’ischio-jambier gauche en octobre dernier. Aidée de mon ego, ce petit démon malfaisant, j’avais poussé trop loin et trop vite dans la posture de Hanumanasana. Bim. Retour à la case départ, la queue entre les jambes, et surtout la honte au ventre d’avoir fait EXACTEMENT le contraire de ce que j’enseigne : j’avais tu la conscience de mon corps et donné un haut parleur à mon ego.

Et la case départ, avec ses remises en questions constantes, m’a amené à rouvrir un livre fascinant : « Dis moi où tu as mal » de Michel Odoul.

« Il me semble difficile de comprendre les relations entre le corps et l’esprit, et par conséquent la signification des maux du corps par rapport aux bleus de l’âme, si nous n’élargissons pas le regard que nous portons sur l’homme et sur la vie (…). En élargissant notre regard et en observant l’homme dans sa globalité physique et temporelle, nous allons pouvoir à nouveau relier les différents niveaux qui composent son existence, lui donnant ainsi sa dimension véritable, qui est avant tout spirituelle. Nous pourrons alors peut-être comprendre la raison d’être de l’homme et, par conséquent, les raisons de son mal-être ».

Le corps parle, et souvent il souffre. Notre premier instinct c’est le Doliprane, l’ordonnance médicale ou parfois même la chirurgie. Mais parfois aussi, il est fascinant d’ouvrir ce genre de livre et d’essayer de comprendre le language de notre corps. Qu’est-ce qu’il est en train de me dire ? Est-ce qu’il y a quelque chose de psychologique à comprendre ? Serai-je en train de me faire du mal sans m’en rendre compte ?

Certes, une blessure par la pratique est quelque chose de concret. Mais tout part du mental. Dans quel état psychologique étais-je au moment de me glisser en Hanumanasana ? Et par la suite, comment mon corps a-t-il réagit ? Pourquoi est-ce que j’ai encore mal ? Tellement mal que le simple fait de m’assoir, de me poser, me lance dans la fesse gauche. Et dès que ça me lance, j’angoisse.  J’en ai des nausées. Je demande l’avis d’une amie qui a toujours les bons mots, et qui en plus est en passe de devenir osthéopathe. « La pratique est juste un outil pour t’aider à TE rencontrer toi même. Tu ne lui dois rien. Si elle t’encombre en ce moment laisse la de côté. Pour l’instant lâche ton attachement à la pratique. D’ailleurs le tendon aussi c’est un attachement d’une structure souple (ton muscle) à quelque chose de solide (ton os). Tiens tiens… Ton attachement te ferait-il du mal ? »

Bien que difficile à avaler, ces mots sonnent juste. Je m’accroche à une pratique qui ne me convient plus physiquement et spirituellement. Trop de choses me troublent dans le monde brilliant, musclé et quelque peu robotique de l’Ashtanga. Mais je me mets la pression, il faut persévérer. Mon professeur me dit de continuer malgré ma blessure, c’est qu’il doit avoir raison. Si j’arrête, je me fais du tort, j’abdique, je ne me bats plus… (Nausées, mal aux fesses, pleurs = déprime) Psychologiquement, je sens qu’un blocage s’est formé il y a un temps lors d’un malentendu avec ce même professeur. Peut-être que mon inconscient s’en souvient encore trop bien, que la confiance s’est perdue malgré ma persévérance. Les questions abondent, me font tourner la tête, me lancent encore et toujours dans la fesse et à 8 jours de mon départ en Inde pour y pratiquer, je n’ai rien d’autre à dire que : « Les gars… J’ai vraiment mal au c** ».

Je décide donc de passer à autre chose. Il faut que j’écoute mon corps, et ça passe par le souffle. Je m’inscris donc pour pratiquer le pranayama à Mysore et annule mes cours auprès de mon professeur d’Ashtanga. Il est temps de me recentrer sur autre chose que ma propre pression interne. Il faut retrouver ce vide agréable qui accepte que je ne suis pas parfaite. Je suis devenu robot, et je n’aime pas ça. Autour de moi, je ne trouve pas d’inspiration face aux professeurs et pratiquants d’Ashtanga qui me semblent rigides certains parfois fermés et d’autres un brin trop « Om Shanti ».


« Practice and all is coming » comme disait Pattabhi Jois. Mais la pratique c’est plus que la Première Série tous les matins 6 fois par semaine. C’est plus que de se « forcer » à se glisser sur son tapis, à « forcer » le corps à bouger quand tout compte fait le mien ne demande que l’immobilisation, le repos, le calme.

J’opte pour une pratique quotidienne plus douce, et surtout, plus courte ce qui me permet de revoir les bases de la Yoga Thérapie.  Je tiens chaque posture 10 longues respirations conscientes, dans la perspective de vasculariser mon tendon douloureux. En plus de tout cela, je me forme à la pratique puissante du Pranayama auprès de BNS Iyengar tous les matins (l’article est ici). Le fait de pratiquer moins de postures me donne la place et le temps de me concentrer sur la maîtrise du Prana et du souffle. Je prends conscience des effets du Pranayama sur mon mental, sur mon corps mais surtout sur ma blessure. Sans être certaine que se soit vraiment lié, toutes les nuits je fais des cauchemars effroyables qui me réveillent en sueur, parfois même en pleurs. Toutes mes peurs, des plus anciennes aux plus récentes ressortent brusquement dès que j’atteins le sommeil. Même si l’experience est désagréable, j’ai l’impression de faire une sorte de purge. Comme si quelque chose s’ouvrait. Et un matin, lors de la relaxation après la pratique avec BNS, alors que je suis allongée en Savasana, d’un coup, mon bassin fait un grand « FLOC ! », et se repositionne au sol tout seul. Tout se stabilise. Je n’ai plus mal.

« Pour la médecine occidentale, tel terrain génétique prédispose à telle maladie. Cette prédisposition peut être congénitale, ou acquise. Pour l’Orient, la maladie témoigne d’un obstacle à la réalisation du Chemin de Vie. La conscience exprime ainsi, par des troubles énergétiques générateurs de maladies, les entraves à son plein épanouissement. » Thierry Médynski, médecin homéopathe

Le chemin est long, criblé d’obstacles qui sont là pour nous apprendre des leçons de vie qui nous donnent l’opportunité de changer ce qui doit changer, pour le mieux. Rien n’est simple. Pratiquer physiquement dans la perspective d’atteindre l’éveil est une erreur. Il en faut plus. La pratique physique façonne le corps à se tenir immobile en position assise afin de pouvoir accéder au dedans sans perturbations, sans distractions, sans aucune excuses de fuite par le mental.

Et tout le long de ce processus de vie, le corps, notre allié, nous parle; il communique, il tente de nous montrer la voie. La maladie ou la blessure peut être un cadeau caché, c’est une opportunité de grandir, d’avancer, d’apprendre mais surtout de dépasser nos schémas inconscients.

Je vous recommande donc de vous procurer les bouquins ci-dessous, et d’y jeter un oeil, même si ce n’est qu’une gastro, une entorse, ou une migraine dont vous souffrez. Se mettre à l’écoute du corps peut heurter l’égo, mais parfois aussi faire sourire. Car lorsque l’on se rend compte que toutes les réponses sont en fait là, au fond de nous même, et que l’on a la capacité de se guérir, en acceptant le face à face, on ne peut que ressentir le précieux que représente notre propre responsabilité face à la vie, et la façon dont nous choisissons de la vivre.

« Ce nouveau regard sur la vie enrichit celle-ci d’une dimension que le matérialisme avait gravement écornée, qui est celle du sens et des relations cause/effet. Le fait que chaque manifestation ait une origine donne du volume à une vie qui avait été figée par le regard plat et cristallisant de l’intellect. Bien mieux encore, cet enrichissement dépasse largement la simple disparition du hasard et de la fatalité. Il crée en effet l’idée que s’il y a un lien entre la cause et l’effet, ce lien constitue, de fait, une relation certes subtile mais ininterrompue entre eux. »